Les damnés de la Libération – Extraits

Les damnés de la Libération – Table des matières

Chapitre 1 – Épurer ! Une urgence et une nécessité

Page 21 – Le temps venu des règlements de compte

Dévalant la pente de Montgueux, puis bousculant les défenses allemandes, les chars du colonel Clarke pénétrèrent au cœur de Troyes. Le lendemain, samedi 26 août, avec l’aide des FFI, les Américains refoulèrent les Allemands de toute l’agglomération…

Le 29 août, le département de l’Aube était libéré.

Or, dès le lendemain de la libération de Troyes, le dimanche 27 août, sous les huées d’une foule surexcitée, des femmes étaient promenées dans la ville. Tondues, dénudées et enduites de goudron ! Les unes dites soumises, c’est-à-dire prostituées, les autres accusées de « collaboration horizontale ». Conduites devant l’Hôtel de Ville, elles furent obligées à prendre la pose en simulant le salut hitlérien. On les photographia en présence de policiers, de résistants, et devant un public d’hommes, de femmes et d’enfants. […] 

Chapitre 2 – Une épuration dite « sauvage »

Page 27 – Sous couvert de la Résistance ou pas, des exécutions sommaires eurent lieu dès les débuts de l’occupation allemande, s’accrurent lorsque le débarquement des Alliés apparut imminent, puis explosèrent au cours des journées libératrices et après la Libération.

Se confondant parfois avec les combats contre l’occupant et ses af fidés français, l’épuration toucha toutes les régions de France. Brutale et impitoyable, jugée à tort ou à raison sanguinaire, en tout cas sans fondement légal, cette épuration aura été qualifiée de « sauvage ». […]

Chapitre 3 – L’organisation d’une épuration judiciaire

p. 76 – Les juridictions spécifiques de l’épuration judiciaire

L’épuration judiciaire, autrement dit légale, impliquait la mise en place d’un dispositif constitué de juridictions spécifiques : une Haute Cour de justice, des cours de justice et des chambres civiques.

Mais ne pouvant attendre les délais exigés par la mise en œuvre de ces juridictions, les commissaires de la République durent s’accommoder d’une justice plus « spontanée » par l’intermédiaire de cours martiales ou de tribunaux militaires qui prononcèrent des milliers de condamnations (sur 77 départements, 769 exécutions ont été ordonnées par les tribunaux militaires). À noter qu’aucun tribunal militaire ne siégea dans le département de l’Aube, lequel abritait pourtant de nombreux maquis (cf chapitre 2). […]

Intermède n° 4L’homme au chapeau vert

Page 89 – Dans le département de l’Aube, le souvenir demeure de ce redoutable agent français de la Gestapo, habituellement coiffé d’un chapeau vert – qui lui valut son surnom –, souvent revêtu de l’uniforme allemand, parfois déguisé en prêtre pour certaines « missions » : Marcel P., né en 1917, marié et père de deux enfants, boulanger de formation puis employé de la SNCF à Saint-Florentin et garde-pêche à Villemoyenne, connaissant divers domiciles à Fouchères, Sainte-Savine, ensuite à Troyes, au siège de la Gestapo.

Dès le début de l’année 1944, P[*] entra au service de l’ennemi en qualité d’agent de renseignements de la Gestapo. Comme tel, il dénonça, arrêta et assassina un certain nombre de patriotes aubois et participa avec les Allemands à l’attaque d’un maquis. Menacé par la Résistance, il fut, pendant plusieurs mois, hébergé dans les locaux [de la Gestapo] du boulevard Gambetta[1].

[1] Cour de justice de l’Aube. Exposé des faits du 14 mai 1945 – ADA, 300W163.

À suivre…