Levés
à 5 h 30. l'employé de l'hôtel est couché dans
le hall, sur un matelas posé à même le sol. Il
se lève pour nous ouvrir. Nous n'avons droit à
aucun "Bye", encore moins de petit déjeuner.
Direction l'arrêt du bus n° 34. Nous longeons le
lac Hoàn Kiêm ; le pagodon est noyé dans la
brume. Rue Hàng Bài, un groupe d'hommes occupe
silencieusement le trottoir pour la mise en lots
de journaux. Plus loin, un groupe de femmes
"gymnase" joyeusement.
Tout se passe bien : on a un bus pour nous
emmener à la gare routière. Départ à 8 h comme
prévu pour Thai Nguyen et - en principe, si nous
nous sommes bien fait comprendre -
correspondance assurée pour Ba Bê (Cho Ra) (1).
La
circulation est intense et toujours aussi
cacophonique. Au bout d'une demi-heure, après
nous être éloignés du centre de la ville,
notre bus est soudainement pris d'une agitation frénétique.
Le klaxon ne cesse de hurler (avec un son
décroissant très caractéristique) ... Serait-on
poursuivi ou participe-t-on à une
course-poursuite ? Non, le chauffeur ne supporte
tout simplement pas d'être devancé par quoi que
ce soit. Et il double, peu importe ce qui arrive
en face ! Soit il trouve le bon régime pour une
"queue de poisson", soit il faut qu'en face on
se gare ! Quant aux virages à gauche, ils sont
serrés... à gauche, et sans aucune visibilité.
Des lignes blanches, il y en a pourtant !?
Et
le klaxon ! le klaxon ! ...
Voilà que nous doublons maintenant un camion !
En face, plusieurs motocyclistes ! Cette
fois-ci, aucun doute, on en écrabouille au moins
la moitié ! Eh bien apparemment non. L'effet
d'optique joue certainement à nous inquiéter.
Mais tout de même, à nos yeux d'européens ce
conducteur prend des risques con-si-dé-rables !
Cela dit, nous devons lui reconnaître une grande
habileté et une concentration sans faille. Et ce
qui est le plus remarquable : ce slalom
routier se fait sans la moindre agressivité.
Aucun commentaire, encore moins d'insulte. Et de
part et d'autre, des visages demeurant
impassibles.
L'être humain a une grande faculté d'adaptation.
La preuve : nous regardons à nouveau le paysage.
Maintenant que nous avons quitté la ville, ce ne
sont plus que des rizières parsemées de tombes (2).
Nous apercevons au loin quelques chapeaux
coniques au travail.
De
Sac Son à Thai Nguyen, les constructions
(habitations, magasins, ateliers...) s'alignent
de part et d'autre de la chaussée sans
discontinuité. Beaucoup de travaux publics
(aménagement de la route et assainissement).
Nous arrivons à Thai Nguyen à 10 h 30 ; le bus
pour Cho Ra est à 10 h 50 ; tout va bien.
Après Thai Nguyen, c'est la campagne, le
parcours est plus calme. Ici, les rizières sont
moins avancées que dans la région de Hanoi ;
elles ne sont pas toutes repiquées.
Une tentative de discussion avec deux jeunes
paysans vietnamiens. La barrière de la langue
réduit nos échanges. C'est dommage, car ils sont
vraiment sympathiques. Le bus s'arrête pour
prendre des tuiles. Plus loin, on déchargera des
pneus. Tout cela en l'absence de tout
formalisme.
Le
paysage a changé : des montagnes et des maisons
sur pilotis et avec toit de chaume... Nous
devons être en pays thaï... Puis des fabriques
de briques que l'on stocke sous de petits abris
tout en longueur...
Arrivée à Cho Ra à 16 h. Soit plus de 7 heures
de bus, ce qui fait une moyenne de 30 km/h. Ce
sera la norme tout au long de notre périple du
nord au sud.
Le
comité d'accueil des motards ne fait pas défaut,
mais nous leur faisons comprendre que nous
voulons marcher. Nous tournons un peu en rond
avant de trouver l'hôtel Thuy Dung (3)
à la sortie du bourg. Nous demandons plusieurs
fois notre chemin. Les gens nous regardent avec
curiosité, mais la plupart d'entre eux font
preuve de gentillesse. Surtout les enfants qui
nous adressent des "Hello ! How are you ?"
enthousiastes.
Accueil chaleureux de la patronne de l'hôtel.
Nous discutons un peu le prix de la chambre et
tombons d'accord sur celui d'une virée en bateau
sur la rivière Nang et le lac Ba Bê. Ici comme
ailleurs, les hôteliers sont un peu
"tour-opérateurs" et cela nous facilite
grandement les choses. |